Qui prétendra que les trois confinements qui ont se sont succédé entre mars 2020 et mai 2021 n’ont pas été de profonds marqueurs sociétaux, dont nous subissons encore les conséquences ?
Être soignante dans le monde d’après la pandémie et ne pas se relever, chuter toujours plus bas sans baisser les bras pour autant. Elle tombe, Chloé, parce que l’hôpital qui était une de ses raisons de vivre, a été sacrifié. Infirmière dans un secteur négligé, la psychiatrie, où le soin passe par l’écoute, dans un monde où personne ne s’écoute plus. Elle dont le but est d’aider les malades à reprendre pied dans leur vie, elle doit lutter contre des gens qui ne veulent plus vivre ensemble. Ne plus se voir ni se parler, ça s’appelle le déni, et c’est le premier niveau de bien des maux.
Yann Madé nous livre un album éminemment intimiste. Son épouse est infirmière en psychiatrie et son fils était un jeune professeur, lors des confinements. Les situations décrites sont donc vécues. Il a d’ailleurs tenu un carnet pendant ces mois d’inactivité forcée, comme nombre de dessinateurs. Mais plutôt que de nous livrer un énième journal, il a choisi de construire un récit fictionnel à partir de faits réels.
Le style de Yann Madé ne plaira pas à tout le monde. Son trait est rapide, sa mise en page en gaufrier assez simple. Mais il faut s’y plonger, c’est un album à lire, absolument. Pour se souvenir de ces mois que nous avons tous vécu de manière très différente, mais aussi pour constater à quel point la dégradation de notre service de santé, dans sa globalité, impacte la société. Et pour toucher du doigt la variété des patients et de ce qu’ils vivent.